Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

Que ferons-nous ? Comment honorerons-nous la mémoire du Cardinal, toute cette année ?

Homélie de Mgr Anatole Milandou, à l’occasion du 30ème Anniversaire de la mort du Cardinal Émile Biayenda, à la Cathédrale Sacré-Cœur, le samedi 24 mars 2007

Monseigneur le Nonce Apostolique,
Chers Confrères dans l’Épiscopat,
Chers Prêtres, Religieux, Religieuses,
Chers Frères et Sœurs en Christ,

1. Une neuvaine pour la paix

Il y a neuf jours, venant de toutes les Paroisses de notre Diocèse, portant un mouchoir blanc à la main, signe de la paix, nous avons inauguré devant Jésus, présent dans l’Eucharistie, signe de son amour pour les hommes, la neuvaine marquant le 30ème Anniversaire de la mort de notre Vénéré Pasteur, le Cardinal Émile BIAYENDA.

Et nous avons associé à cet amour de Jésus, à sa vie donnée pour nous les hommes, celle du Cardinal Émile Biayenda, notre Pasteur qui, lui aussi, pour le salut de nous tous Congolais, a donné sa vie. Son dernier message, nous l’avons redit est : « A tous nos Frères croyants du Nord, du Centre et du Sud, nous demandons beaucoup de calme, de fraternité et de confiance en Dieu, Père de toutes tribus, afin qu’aucun geste déraisonnable ne puisse compromettre un climat de paix, que nous souhaitons tous ». Oui, Président en exercice du Conseil œcuménique, cette année-là, il exhortait les chrétiens du Congo à la confiance totale en Dieu, afin de maintenir envers et contre tout un climat de paix, d’espérance gravée dans le cœur de tout homme.

Je vous invitais au cours de cette célébration à faire régner la paix dans vos foyers, dans vos quartiers, dans les départements de notre pays, particulièrement là où celle-ci reste encore fragile. Durant ces neuf jours, dans vos Paroisses, vous vous êtes rassemblés autour de la pensée du Cardinal Biayenda, pour prier pour sa béatification et sa canonisation. Des jeunes et beaucoup d’autres personnes sont allés en pèlerinage sur le Mont Cardinal Émile BIAYENDA. Vous avez prié, beaucoup prié. Je vous en remercie, au nom du Seigneur.

Aujourd’hui, au cœur de cette Eucharistie solennelle qui débute l’année du Cardinal, je voudrais rappeler quelques aspects de la vie de notre Pasteur bien aimé, le « Bon Cardinal Émile Biayenda ».

2. Mort pour son peuple

Le jour de sa mort, le matin même, il avait conscience de la gravité de la situation dans laquelle se trouvait le pays, suite à l’assassinat du Président Marien Ngouabi. Des amis lui ont proposé d’aller se cacher, de prendre du recul et de se mettre à l’abri. Et lui de répondre : « Etre absent de Brazzaville serait une catastrophe pour l’Église du Congo. J’y suis et j’y reste. Je préfère donner ma vie comme le Christ, pour sauver mon Clergé et mon Église que d’aller me cacher je ne sais où ! ».

Le Cardinal savait !
Le Cardinal avait conscience de la gravité des tensions.
Le Cardinal avait une intuition très forte de ce qui allait se jouer.
Il y a été jusqu’au bout ! J’y suis et j’y reste !

Jésus, le premier, a été jusqu’au bout de cette logique de l’Amour, de ce chemin de l’Amour. Il a été jusqu’au bout : donner sa vie, déposer sa vie entre les mains du Père ! C’est ce que nous ne cessons de proclamer, Eucharistie après Eucharistie : Ceci est mon Corps. Ceci est mon Sang !

Ceci est ma vie donnée, livrée pour vous. Toute la vie de Jésus, depuis le recouvrement au temple, à 12 ans : « Ne savez vous pas que je dois être aux affaires de mon Père ? » Jusqu’à l’agonie, une seule affirmation, une seule attitude, un seul grand geste : donner.

De même, toute l’humble vie du Cardinal faite de don, de joie, de bonté, de service, a préparé son oui du cœur : « J’y suis, j’y reste », son acceptation de la mort criminelle.

Frères et Sœurs,

Notre chemin, à nous, baptisés, est le même : aimer, en acceptant de donner : donner du réconfort, donner de l’amitié, donner le pardon, donner la paix.

Ce que Jésus nous demande, c’est de le faire chaque jour, petit à petit, sans nous lasser, sans nous laisser abattre par l’échec.

Nous sommes les témoins de l’Amour de Jésus. Nous sommes les témoins de l’Amour du Cardinal.

3. Témoins de l’amour du Christ

Chers Frères et Sœurs,

Je vous envoie, vous les « témoins de l’Amour », je vous envoie dans vos familles, dans vos quartiers, pour propager l’amour, le pardon, la réconciliation, la paix.

Ne fuyez pas, ne vous dérobez pas. Mais, comme le Cardinal, Je suis dans telle famille, j’habite dans tel quartier, Je vis dans tel département et bien j’y suis et j’y reste !

Pour donner cet amour de paix, de pardon, de réconciliation dont nous avons tous besoin.

Tous ceux qui ont connu le Cardinal restent marqués par son accueil, son sourire, sa joie ; la bonté illuminait ses yeux. Nous étions subjugués. Ce n’est pas pour rien que nous l’avons appelé le « Bon Cardinal », « le Bon Émile » pour tous ses familiers.

Le Cardinal aimait l’homme, il portait sur tous ceux qu’il rencontrait un regard d’amitié, de bonté, de tendresse. Ici, au Congo, nous en sommes certains ! Mais allez en Normandie, à Fresnes où il a passé des vacances, en Alsace ou à Lyon, partout le même mot : Le Père Émile, le Bon Père Émile !

Le Cardinal savait apprécier les qualités de toute personne rencontrée. Il avait le don, l’intelligence de les mettre en valeur. Il avait du mal à imaginer qu’une personne puisse faire du mal, puisse faire le mal. Son cri du cœur devant des faits, des attitudes de haine, de violence, restait le même : « Ne faites pas cela ».

Il regardait son contemporain, il regardait toute personne rencontrée, accueillie, écoutée avec le même regard de Jésus voyant le jeune homme : Jésus fixa sur lui son regard et l’aima (Mc 10, 21).

Nous faisons mémoire du Cardinal, avons-nous, frères et sœurs, oui avons-nous le même regard, la même bienveillance, la même amitié, le même amour pour tous ceux avec qui nous vivons, avec tous ceux de notre famille, de notre quartier, de notre commune ou de notre département.

Laissons-nous interroger par le Cardinal. Mais, pourquoi faites-vous cela ? Pourquoi tant de regards inamicaux, tant de rencontres houleuses, tant de méchanceté, de jalousie, de calomnies, de divisions, de suspicions, de fausses accusations dans vos quartiers, vos villages, dans vos foyers ?…

Jésus nous dit que ce n’est pas de l’extérieur de l’homme que vient le mal, c’est du dedans, du cœur des hommes que sortent les désirs pervers : cupidité, méchanceté, ruse, envie, diffamation, orgueil, désarroi. Toutes ces mauvaises choses sortent du dedans et souillent l’homme (Mc 7, 21).

Le Cardinal ne nous dit pas autre chose. Dans ce temps de Carême, laissons-nous toucher, scruter, interroger par ces paroles de Jésus et reprises par le Cardinal. Reconnaissons-le. Eh oui c’est vrai ! Que de méchanceté, de vilénies, de malédiction sortent du dedans de notre cœur et nous enferment dans la suspicion, la haine et même la violence !

Nous voulons notre pays en paix. Nous voulons notre pays réconcilié dans la justice et la vérité. Et nous avons raison ! Ce que je veux vous dire, en ces journées de mémoire du don total du Cardinal :

Cette paix ne pourra faire l’économie de notre propre effort pour pacifier notre cœur, pour réconcilier notre cœur avec tout ce qui nous bloque, nous renferme sur nous et nous empêche d’accueillir, de regarder, d’écouter avec un cœur bon, compatissant, pacifique et réconcilié cet humble, ce petit levain qui fait fermenter la pâte en résurrection, en vie !

4. L’année du Cardinal

Cette Eucharistie marque le début de « l’année du Cardinal » que nous allons vivre jusqu’au 22 mars prochain, c’est-à-dire 2008. Que ferons-nous ? Comment honorerons-nous la mémoire du Cardinal ? Du bout des lèvres ? Par des actions purement extérieures ?

La Commission diocésaine de « l’année du Cardinal », que je remercie très sincèrement au passage, pour l’organisation, va nous aider à vivre spirituellement cette année de grâces.

C’est une grande occasion qui nous est offerte non seulement pour implorer la miséricorde divine, afin que la cause de béatification et de canonisation connaisse un aboutissement heureux, mais c’est également l’opportunité d’œuvrer pour la paix véritable, dans notre pays, surtout à l’orée des consultations électorales qui vont se dérouler dans notre pays. C’est un devoir civique de haute portée de participer au choix de nos gouvernants. Mais, il faut le faire dans la sagesse, la responsabilité et la paix. Nous allons confier ces moments importants à notre Vénéré Pasteur, le Cardinal Émile BIAYENDA.

J’invite le Peuple chrétien de Brazzaville à vivre cette année, en méditant sur la pensée, la personne du Cardinal Émile. Certes, des activités spirituelles seront sûrement organisées. Il faudrait y participer avec la ferveur et l’assiduité nécessaires, en vue de profiter au maximum des fruits éventuels que nous pourrions recevoir.

A côté de cela, ne serait-il pas opportun de penser à mieux organiser les visites au Mont Cardinal Émile BIAYENDA ? Beaucoup de sectes s’y rendent et nous avons l’obligation de protéger ce patrimoine qui symbolise le lieu du martyre de notre Pasteur. Je reste, personnellement, très attentif à toutes les initiatives susceptibles d’embellir et de rendre plus accueillant ce lieu où notre Cardinal a offert sa vie, en victime innocente, pour la paix, la réconciliation et l’unité du Peuple Congolais.

Puisse la Vierge Marie, Mère de la paix, de la réconciliation et de l’unité, nous aider à mieux vivre cette année, en compagnie du Cardinal, pour la plus grande gloire de son Fils.

Amen !

Mgr Anatole Milandou
Archevêque de Brazzaville

 


 
 
 
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