lundi 25 novembre 2024
Mgr Andrès CARRASCOSA COSO, Nonce Apostolique au Congo et au Gabon
Le samedi 22 mars 2007, au sortir de la célébration eucharistique marquant le 30ème anniversaire et le lancement officiel de l’année du Cardinal Émile Biayenda, nous avons pris rendez-vous avec le Nonce Apostolique au Congo, Mgr Andrès CARRASCOSA-COSO, pour un entretien à sa résidence. Le vendredi 30 mars, c’est chose faite, Mgr le Nonce Apostolique s’est prêté à nos questions.
La Mémoire Biayenda : Excellence, vous venez de participer, avec le peuple de Dieu qui est à Brazzaville, à la célébration du 30ème anniversaire de la mort du Cardinal Émile Biayenda. Quels sentiments aviez-vous ?
Mgr Andrès Carrascosa Coso : J’ai accepté très volontiers l’invitation de Mgr l’Archevêque de Brazzaville à participer à la célébration du 30e anniversaire de la mort du Cardinal Émile Biayenda. Et je l’ai fait de tout mon cœur, comme d’ailleurs j’avais accepté de présider l’Eucharistie au Grand Séminaire « Cardinal Émile Biayenda » le jeudi 22 mars, pour marquer leur fête annuelle et conférer les ministères de « Lecteur » et « Acolyte » à une soixantaine de grands séminaristes. Et je l’ai fait parce que je considère que le Cardinal est une bénédiction de Dieu, pour cette Église et un grand modèle de vie chrétienne.
La célébration eucharistique, à la Place Mariale, a été très belle, avec une grande participation du peuple de Dieu. Et j’aimerais souligner que l’homélie de Mgr Milandou a donné un “ton” de profondeur. Je partage, totalement, sa proposition de célébrer l’année du Cardinal, comme une démarche de conversion personnelle, de se remettre en cause pour comprendre où est-ce que chacun doit écouter, dans sa propre vie, la voix du Seigneur, pour la suivre avec une plus grande fidélité. Je pense que ça serait, bien sûr, la plus grande grâce dans l’année du Cardinal pour l’Église du Congo.
La M.B. : À l’issue de la Messe, vous avez visité l’appartement où a vécu le Cardinal Émile Biayenda. Qu’en dites-vous ?
Mgr A.C.C. : Oui, après la Messe, Mgr Anatole Milandou m’a invité à visiter l’appartement où vivait le Cardinal. Je ne connaissais pas cet espace et je dois dire que c’est impressionnant. Il parle beaucoup de la simplicité et de l’humilité de ce grand homme de Dieu, qui n’a pas voulu se transférer dans l’appartement de l’Archevêque, dans la nouvelle maison, plus moderne et commode, plus je connais la figure du Cardinal et j’essaie de lire tout ce que je peux sur lui - plus je découvre que c’est vraiment dans son humilité et dans la profondeur de sa vie, où sa foi devient transparente, que réside le secret de sa « grandeur ». Je trouve très approprié le titre d’un livre biographique : « La grandeur d’un humble ».
La M.B. : Quelles impressions avez-vous, lorsque vous avez touché de vos mains ses ornements et plus particulièrement la soutane qu’il avait portée le jour de son assassinat ?
Mgr A.C.C. : J’ai beaucoup apprécié le fait qu’on a gardé ses ornements et ses effets personnels. C’est la base d’un musée qui a une grande valeur. Mais vous dites bien : la chose la plus impressionnante est la soutane qu’il portait le jour où il a été assassiné. Elle fait bien comprendre la cruauté de cet assassinat effroyable. Mais ce qui m’a le plus frappé c’est que cette soutane semblait parler, à partir de la foi du Cardinal et de sa vie livrée par amour : « Père, pardonne-leur parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font ».
La M.B. : Sa Cause de béatification et de canonisation a été introduite à Rome. En tant que représentant du Saint-Siège au Congo, que pourriez-vous dire à la chrétienté qui attend l’aboutissement de ce processus ?
Mgr A.C.C. : J’aimerais dire qu’une cause de béatification ou, après, de canonisation est une chose très complexe et très sérieuse dans l’Église Catholique.
Et sur cette question, il faut avoir les idées claires. C’est vrai que la phase diocésaine du processus a été conclue et que la cause a été portée à Rome. Mais, avant de pouvoir la soumettre à l’étude de la Congrégation pour les Causes de Saints, il faut faire encore un énorme travail. Il y a certaines exigences, prescrites par le règlement établi au niveau mondial, qu’il faut encore remplir. Je peux vous dire, à partir de mon expérience, dans plusieurs pays, qu’une cause de béatification exige un grand travail, un grand dévouement et pas mal de temps.
Je le dis parce que j’aimerais dissiper certaines fausses opinions et même certaines accusations gratuites que j’ai écoutées : « c’est la faute de l’Archevêque » ou « c’est la faute du Saint-Siège » ou « c’est la faute de je ne sais pas qui » si la cause de béatification n’aboutit pas encore. Ce n’est pas vrai ! Pendant mon récent séjour à Rome, j’ai voulu approfondir la question pour mieux comprendre. J’ai parlé de mes conclusions à Mgr l’Archevêque et à Mgr le Président de la Conférence Épiscopale, et peut-être qu’il faudra organiser, de manière différente, le travail de la "postulation". Mais une telle décision ne revient pas à moi.
La M.B. : Avez-vous déjà reçu des gens qui vous ont parlé du Cardinal Biayenda, ou des personnes qui ont reçu les faveurs du Seigneur par son intercession ? Si oui, de quoi vous ont-elles parlé ?
Mgr A.C.C. : Oui, j’ai écouté un bon nombre de personnes qui m’ont parlé soit du Cardinal et de sa vie que de l’effet sur leurs vies de son intercession. Permettez-moi de ne pas révéler ce qui doit rester réservé à cause de la nature des entretiens. Mais ce n’est pas à moi qu’il faut parler des faveurs. Il faut procéder d’une manière très sérieuse et systématique avec les travaux qui doivent être réalisés au niveau de la postulation, pour pouvoir soumettre la « cause » à l’étude de la Congrégation pour les Causes des Saints.
La M.B. : Vos impressions sur le journal « La Mémoire Biayenda » ?
Mgr A.C.C. : Je reçois le journal « La Mémoire Biayenda » et je peux dire que je le lis. Dans chaque numéro, il y a des choses que j’aime plus et d’autres moins, comme c’est normal. Mais, je considère d’une grande importance le fait d’avoir un journal qui continue à promouvoir cette « mémoire » et à proposer les enseignements de la prédication, de la vie et de la mort du Cardinal.
La M.B. : Quel message voulez-vous adresser aux lecteurs de « La Mémoire Biayenda » ?
Mgr A.C.C. : En ce moment où l’Église au Congo commence à célébrer l’année du Cardinal, je prie le Seigneur que, par l’intercession de ce grand Pasteur qui a donné la vie pour ses brebis, cette année soit un temps de grâce pour nous tous. Surtout, la grâce de pouvoir approfondir la foi et que la foi arrive à imprégner tous les aspects de la vie. C’est le vécu, et pas seulement les paroles, qui manifeste si nous avons la foi. Je répète toujours aux Évêques, aux prêtres, aux séminaristes, aux religieux et religieuses et aussi aux laïcs engagés que ce qui arrive aux gens et qui peut les aider à une conversion, à une vraie évangélisation de leur existence n’est pas la parole : c’est notre vie tout entière qui parle pour nous. Et le Cardinal Biayenda est un modèle de cela : sa vie "parlait", et par conséquent, ses paroles ont une force plus grande. Continuons à nous nourrir de ses paroles et de ses exemples qui nous parlent d’Évangile vécu, de Parole de Dieu faite vie.
Propos recueillis par Grégoire YENGO DIATSANA
Dans la même rubrique