Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

« Anatole MILANDOU, ne tremble pas devant ton jeune âge, Dieu t’a déjà choisi pour lui et pour son peuple »

Bien cher Fils,

Tu vas être ordonné Prêtre du Seigneur. Sois dans la joie avec nous. Car, pour toi, s’accomplissent aujourd’hui, de grandes choses, des choses incompréhensibles à nos yeux d’hommes. Le Seigneur fait de toi un Prêtre. Si tu deviens Prêtre aujourd’hui dans le Sacerdoce unique de Jésus médiateur, si, comme Jésus, tu deviens médiateur entre Dieu et les hommes, une chose est clairement réjouissante : sois heureux d’avoir été choisi de toute éternité.

Avant que tu ne sois né, avant que tu ne sois formé dans le sein de ta chère mère Madeleine, avant que tu n’aies pu exister, le Seigneur t’avait choisi et mis à part pour lui et pour le peuple. C’est cela le mystère de la vocation. Il n’y a pas de hasard. Tout arrive selon un plan préétabli de la sagesse de Dieu. Car Dieu a créé et organisé le monde avec sagesse et par amour.

En acceptant d’être Prêtre en Jésus, tu permets au Seigneur de réaliser son choix d’amour et de prédilection. Il fait de toi son Fils unique : car, avec Jésus, tu porteras le salut du monde. Ne tremble pas : « Et toi petit enfant, qu’on appellera prophète du Très-Haut, tu marcheras devant la face du Seigneur pour préparer ses chemins, pour annoncer à son peuple le salut par la rémission de ses péchés ... ».

Ne tremble pas devant ton jeune âge. Que l’on ne se moque pas de ta jeunesse, dit Saint Paul à Timothée, « Car aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre d’années » a dit un écrivain célèbre, Corneille, pour ne pas le citer.

Tu as eu beaucoup de courage pour faire ce pas que bien de jeunes n’osent pas faire. Mais, si tu as eu un tel courage, c’est parce que tu as fait confiance en Jésus-Christ et en son Église : alors tu as persévéré dans ta décision de servir l’humanité, au nom et à cause de Jésus. Que tu le saches, cher fils. Jésus-Christ est fidèle. Il ne te fera jamais défaut. Et toute notre prière demande que les forces du mal n’aient jamais le dessus ni sur toi, ni sur tous tes frères dans le Sacerdoce.

Veuille seulement vouloir rester fidèle à la mission du Christ « d’annoncer le salut par la rémission des péchés », d’aider les hommes à servir ce monde en justice et sainteté devant la face du Seigneur, tout au long de leurs jours ...

Chers fils, la fonction que tu acceptes d’exercer dans ce monde est un mystère voilé, mais capital. On le dénigre, mais tout le monde compte dessus, sans le savoir. A tous ceux qui peuvent te mépriser, dis : « Ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Il faut, tous les jours de ta vie, essayer d’approfondir ta mission de prêtre. Et pour comprendre ta mission, il faut t’asseoir devant la face du Christ, comme Marie. Lui te dira ce que le Père t’envoie faire dans ce monde, car s’il est vrai que le Christ est mort pour cette mission, c’est dire que c’est une mission qui vaille la peine.

Il faut t’asseoir et prêter l’oreille au Seigneur, comme le jeune Samuel, en disant : « Parle Seigneur, ton serviteur écoute ». Le texte ne continue pas et ne précise rien sur ce que dit le Seigneur. Samuel aura toute la vie à entendre, au fil des jours, ce que dit le cœur de Dieu aux hommes.

Toi aussi, tu es prêtre aujourd’hui, mais ta mission, c’est au long des jours que tu la recevras du Seigneur auprès des hommes. Ne t’agite donc pas à la façon de Marthe. Sois attentif au Seigneur par la prière et la méditation et tu seras à même de participer au développement du pays et du monde avec les maçons, avec les mécaniciens, avec les infirmiers, avec les enseignants, avec les politiciens, avec les ménagères, les étudiants, avec les cuisiniers, avec les ouvriers, avec tous les hommes que Dieu mobilise dans sa sagesse pour construire son monde.

Tu es appelé auprès de toutes ces catégories de travailleurs comme Jean Baptiste pour leur annoncer le salut qui s’accomplit par eux en chaque situation où chacun œuvre. Mystère de foi : Il n’est pas nécessaire d’être maçon pour annoncer aux maçons le salut de Jésus ; il est seulement nécessaire que tu écoutes Jésus lui dire ce qui est pour le salut de cet homme.

Tu seras trouvé fidèle, si tu acceptes de persévérer dans la prière et la méditation.

Tu es appelé à être Képhas, toi aussi, c’est-à-dire : Pierre. Car comme le disait Jésus à Simon Pierre, le prêtre est appelé à affermir ses frères dans la foi, c’est-à-dire, dans la recherche perpétuelle du bien et uniquement du bien. A toi, comme à tout prêtre, nous disons : « Tu t’appelleras Képhas-Pierre ». Mais tu seras « Képhas » solide, si tu acceptes de vouloir persévérer dans la prière et la méditation qui, seules, te rendront réellement attentif à Jésus et aux hommes.

Bien chers parents

Soyez bénis du Seigneur, soyez dans la joie, réjouissez-vous ! Vous êtes bienheureux, vous avez trouvé grâce devant le Seigneur, car Dieu a choisi (l’un) de vos chers enfants pour lui. Il vous aime, il aime votre maison.

Nous vous félicitons d’avoir eu le courage de laisser votre enfant qui aurait pu vous travailler de l’argent. Vous avez eu ce courage parce que vous aviez la foi. Vous avez ainsi donné vraiment au monde entier votre enfant. Et ce n’est pas exagéré de dire que toutes les générations d’hommes auxquelles votre enfant va annoncer le salut vous béniront en disant : « heureuses les entrailles qui ont porté cet enfant ».

A vous et à tous les parents qui ont donné leurs enfants au service de Dieu, dans ce monde, nous disons que le monde vous doit une récompense et le Seigneur le sait et s’en souvient.

A l’assemblée chrétienne

Mes bien chers Frères et Sœurs, si vous êtes venus si nombreux, c’est signe que le Prêtre présente quelque intérêt pour vous. Comme disait le Curé d’Ars, « ce n’est que dans le ciel que nous comprendrons le mystère du Prêtre », pour le monde.

Dans ce monde grisé par la technique et par l’argent, nous pensons trop facilement qu’on peut se passer d’un prêtre. Le même Saint Curé d’Ars dit encore : « Enlevez le prêtre d’un village pendant 25 ans, les hommes y adoreront des bêtes ».

Le prêtre est médiateur des hommes auprès du Dieu créateur et Père de ce monde. « Il est établi pour intervenir en faveur des hommes dans leurs relations avec Dieu ». Si le sacerdoce des fidèles se suffisait à lui seul, le Christ n’aurait pas institué le sacerdoce apostolique, le sacerdoce ministériel.

Le monde a besoin de prêtre, de l’homme de Dieu, consacré à Dieu, comme de tous temps le monde a toujours eu besoin des prophètes, des hommes qui parlent de la volonté de Dieu, maître de ce monde.

Partout où je viens de passer, dans mes tournées de confirmations et de visites pastorales, on m’a demandé des prêtres. On demande des prêtres ici à Kinkala, à Ste Anne, à Moungali, à Ouenzé, à Notre-Dame, à Linzolo, à Boko, à Vinza, à Mayama, au Petit Séminaire de Mbamou. Là où il y a un prêtre, il y a quelque chose de différent et de très beau pour l’unité et la paix.

On parle beaucoup aujourd’hui du sacerdoce baptismal du peuple chrétien. Ce sacerdoce baptismal veut dire que chaque chrétien est médiateur de l’humanité avec le Christ et par le Christ. Mais ce sacerdoce, le laïc l’exerce selon la spécificité de sa vocation et de son état de vie. Il lui suffit de bien accomplir, en chrétien, ses devoirs. Le bien qu’il produit intercède pour l’humanité et l’élève auprès du Père.

L’Esprit-Saint travaille en chaque homme et par là chaque homme, selon son charisme, élève le monde et intercède pour le monde.

Mais Dieu a vu qu’il fallait des hommes spécialisés, mis à part pour élever le monde, de façon consciente et efficace. Le Premier et l’Unique médiateur chargé d’élever le monde vers le Père, c’est Jésus-Christ, seul Prêtre, debout devant le Père, dans l’Esprit. Et Jésus-Christ, ensuite, a choisi les apôtres pour perpétuer, de façon efficace et réelle, l’élévation sanctifiante de l’humanité.

Les prêtres sont établis donc pour présider à ce vaste mouvement de Pentecôte qui aide les hommes à ramener tout ce que chacun fait de bien pour le bien de tous ; le prêtre enseigne aux hommes à se tourner les uns vers les autres à cause de Dieu, à travailler pour les autres.

Le prêtre, par le Christ, fait concourir le bien que les hommes produisent au bonheur de tous. Il a la mystérieuse mission de ramener les œuvres des hommes pour les présenter à Dieu le Père qui veut l’unité de ce monde par le Christ, Notre-Seigneur, en qui il donne au monde toute grâce et tout bien. Le prêtre unit les hommes dans le sang : en leur révélant Dieu, leur unique Père ; le prêtre apprend aux hommes à s’aimer comme des frères. Le prêtre cimente la paix parmi les hommes, par la puissance du mystère du sang du CHRIST.

Le prêtre garantit la dignité de l’homme et aide les hommes à reconnaître cette dignité : « Enlever le prêtre d’un village, dans 25 ans, les hommes adoreront les bêtes », c’est-à-dire s’avilissent.

Le prêtre forme la conscience de l’homme et fait de l’homme un homme d’honneur, un citoyen consciencieux.

Voilà brièvement, chers frères et sœurs, une esquisse du travail que produit le prêtre en annonçant Jésus-Christ avec Foi...

Puisse le Seigneur susciter des jeunes gens comme pour annoncer l’amour fraternel et l’unité des hommes en Jésus-Christ.

Amen !

Émile Cardinal BIAYENDA,
Homélie à l’occasion de l’Ordination Sacerdotale de l’Abbé Anatole MILANDOU,
le 23 Juin 1974 à Kinkala.

 


 
 
 
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