Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

« On dénote un certain manque de discrétion dans notre Église locale »

Quand les gens ont des choses à dire de bon ou de moins bon sur celui-ci ou celui-là, ils viennent voir le Cardinal. « La maison divisée contre elle-même tombera ».

Le monde a besoin de signes qui rappellent le Sacré, Dieu. Ne nous y dérobons pas. Si nous sommes consacrés à Dieu pour nos frères, nous devons tenir compte d’eux, de leurs paroles, de leurs vœux, de leurs recommandations. Ne les traitons pas d’arrières. Le jour où ils se tairont, où ils fermeront leurs yeux, nous paraîtrons ridicules, ennuyeux à nos propres yeux. Nous serons ce sel affadi qui n’est meilleur qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds.

J’en arrive à certaines de vos propres constatations portant sur le malaise les départs causés par :

- l’esprit du bloc des Sœurs et du bloc des Abbés ;

- le manque de contact parce que certaines Sœurs sont étiquetées par d’autres Sœurs,

Pères, Abbés ou laïcs, je pense qu’il faut bien faire et laisser dire.

Je pense qu’il faut tenir compte aussi des rumeurs, de certains « on dit » pour sa gouverne personnelle et pour une révision et en communauté.

Quant à nos rencontres, elles doivent être prudentes et sérieuses. Ne pas se laisser gagner par je ne sais quel laisser aller, quelle espèce de familiarité de paroles, taquineries, de gestes, etc. Nos rencontres devraient être édifiantes, pleines de soucis de notre apostolat et des âmes que le Seigneur a placées sur notre route.

On dénote un certain manque de discrétion dans notre Église locale (entre les Sœurs de différentes Congrégations ou entre les Sœurs et les laïcs). Un dicton enseigne que « toute vérité n’est pas bonne à dire ». Craignons cet autre adage qui dit à peu près ceci : « Je ne suis jamais sorti des hommes, sans être moins homme ».

Souvent nous manquons de confiance en nous-mêmes. On a l’impression que la mission de l’Église catholique au Congo tomberait automatiquement si un jour aucun expatrié n’était plus dans nos rangs.

Ce que nous ne souhaitons, à Dieu ne plaise ! J’ai même souvent constaté que quelques responsabilités confiées à des prêtres indigènes tomberaient s’il fallait se fier à l’agrément de nos compatriotes en service.

Le remède vous l’avez trouvé. D’abord, ce n’est pas de vivre en vase clos. Vous avez pris conscience que vous êtes d’Église et toutes conviées au service du Seigneur non pas en ligne dispersée, mais bien en ordre, sous la houlette d’un Responsable, votre Évêque par la grâce de Dieu. C’est pourquoi, vous avez exprimé le légitime désir de le rencontrer, pour que vous lui parliez et qu’il vous parle.

Vous voyez et vous vous rendez compte qu’il faut être au-dessus des familles tout en sachant que celles-ci vous servent de moule et de mère nourricière qui vous aide à être fidèle au Seigneur, à votre devoir d’état et à tous les hommes, nos frères.

Ne scandalisons personnes ni en paroles, ni en actes, ni dans nos conversations entre nous et les laïcs.

Essayons de nous unir, de nous défendre mutuellement, sans chercher à attirer les critiques que nous pourrions entendre sur les uns et les autres.

Sachons oublier le passé et repartir à zéro Paul VI à l’Évêque de Bayeux écrit : « l’insertion réaliste dans la communauté chrétienne où l’on est appelé à vivre dans l’instant présent nous apparaît comme une grâce éminemment souhaitable pour notre temps ».

Baisse des vocations

Ce n’est pas typique au Congo. C’est universel. Ne cherchons pas à trouver sa seule cause dans la fondation de la Congrégation diocésaine, comme l’auraient prétendu certains.

On est têtu :

Persévérant dans ces idées de défaillance. Je n’ai presque jamais décidé une personne en difficultés à changer de résolution ou d’avis. Toujours on est presque sorti de mon bureau avec ses idées et on est reparti les réaliser.

Pour une Église qui a une hiérarchie locale, les familles religieuses, diocésaines sont institutions normales et habituelles.

Je n’ignore pas les difficultés que cela a rencontrées notamment dans cette entreprise des Sœurs Congolaises du Rosaire. On ne peut lui attribuer toutes les causes de baisses de vocations féminines. Quand Zungula a été fondée, les autres familles religieuses avaient, certaines, un important effectif très prometteuse d’ailleurs de jeunes filles désireuses de devenir religieuses. Vous avez heureusement reconnu que cela ne serait pas la seule cause de la crise des vocations, de l’instabilité de celles qui se sont déclarées.

Le monde et les jeunes qui montent exigent de nous les aînés un témoignage d’âmes consacrées, fortes, décidées, heureuses dans le choix de vie de leur idéal.

Notre valeur, Dieu seul peut la connaître et la mesurer. Le plus grand, dans le royaume, doit être le plus petit. Le Christ, au milieu de ses Apôtres, était comme celui qui sert.

Aucun ne devrait se prévaloir de ses talents. Chacun devrait mettre ses talents au service de Dieu, de l’Église, de sa communauté religieuse et humaine, au service de son compagnon de vie religieuse. Ce que cela pourrait nous apporter : considération, dignité, gain, avantage, ça devrait être pour l’honneur de toute la communauté. Quelle que soit notre charge au sein de notre communauté et de notre peuple, nous devons considérer cela comme les moyens, les talents que Dieu, la famille religieuse nous ont données pour servir et pratiquer la charité. En tout et partout, ne jamais perdre de vue la consécration particulière de notre volonté, de nos désirs, de toutes les richesses et puissances que Dieu a mises en nous, mais auxquelles volontairement pour la mission et le royaume nous avons renoncé. Notre force doit demeurer en Dieu et en notre communauté. Le Saint Père écrit ceci à propos de Sainte Thérèse : « Beaucoup voient mal comment concilier concrètement l’épanouissement personnel et les exigences de l’obéissance religieuse ou de la vie en commun ; la liberté et l’autorité ; la sainteté et l’institution ; la vérité des rapports et la charité.

La diversité des charismes et l’unité ; le réalisme quotidien et la contestation « prophétique du présent... »

Déjà, écoutons ce que nous disent les Actes des Apôtres des premières communautés chrétiennes : « Ils étaient assidus à l’enseignement des Apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. Tous les croyants ensemble mettaient tout en commun ; ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et en partageaient le prix entre tous, d’un seul cœur, ils prenaient leur nourriture avec joie et simplicité de cœur. Ils louaient Dieu et avaient la faveur de tout le peuple. Et chaque jour, le Seigneur adjoignait à la communauté ceux qui se seraient sauvés ».

Nous avons certainement beaucoup à apprendre de ces renseignements. Tout y est. Demandons souvent au Seigneur de mettre dans nos communautés et en nous l’esprit de la primitive Église.

Notre premier souci doit être celui d’être des signes du Christ et d’Église. Notre premier rôle doit être de donner le Christ, d’évangéliser, d’annoncer la Bonne Nouvelle aux autres, sans oublier ceux de notre famille auxquels nous devons expliquer pour ainsi dire les rouages de notre vie de consacrés. Pour qu’ils nous respectent dans ce domaine, qu’ils s’efforcent de nous être plus proches par leurs efforts de vie plus exemplaire aux yeux des autres.

Les jeunes ne peuvent être frappés que par le rayonnement de notre vie, les fortes convictions que nous en avons pour défendre notre état de vie et le mystère de notre vie.

Le témoignage collectif compte beaucoup, de même celui de la charité et de l’entraide en Église à nos frères et sœurs éprouvés moralement, spirituellement, physiquement, matériellement.

Prière pour les uns et les autres.

Essayer de nourrir notre foi, puisque c’est la diminution, l’étoilement de la foi qui sont la véritable cause de la baisse des vocations religieuses.

Cardinal Émile Biayenda,
rencontre avec les religieuses de la Congrégations des sœurs du Rosaire,
le 29 Septembre 1973 à Brazzaville

 

 


 
 
 
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