jeudi 9 janvier 2025
Extrait de l’intervention du Cardinal Émile Biayenda au Synode de Novembre 1973
C’est au nom de notre Conférence Épiscopale de la République Populaire du Congo que je me permets de prendre la parole dans cette auguste Assemblée.
Notre Conférence, tenue en Mai et en Novembre 1973, s’est notamment penchée sur les problèmes de l’ÉVANGELISATION AU CONGO. De nos réflexions pastorales, nous avons dégagé les priorités suivantes :
Tout cela a été consigné dans un document, remis en temps opportun à notre Délégation Apostolique pour transmission à la Congrégation pour l’Évangélisation des Peuples, et nous venons également de le déposer au Secrétariat Général du Synode.
Dans la « Pastorale des Sacrements », ce qui a le plus retenu notre attention est la Pastorale des fidèles en situation matrimoniale irrégulière et le problème de l’adaptation liturgie.
En République Populaire du Congo, comme par ailleurs, il arrive que des fidèles se voient écarter de la réception des sacrements, en raison de leur situation matrimoniale irrégulière. Beaucoup d’entre eux s’efforcent néanmoins de mener une vie chrétienne généreuse et désireraient pouvoir s’approcher du sacrement de Pénitence, et surtout recevoir l’Eucharistie.
Parmi eux se trouvent tous ceux qui s’engagent dans une union coutumière, sans célébrer le mariage devant l’Église ; ceux qui ont rompu leur mariage religieux et se sont remariés selon la coutume ; ceux qui, d’une manière ou d’une autre, participent à une union polygamique.
Il convient de rappeler que ces fidèles qui ont souvent beaucoup d’excuses, ne sont en aucune façon excommuniés. Ils font toujours partie de la communauté chrétienne, et Dieu seul qui sonde les reins et les cœurs, sait quelle est leur vraie place dans son peuple.
Si, selon la discipline actuelle de l’Église, ils sont privés de la réception des sacrements, cela ne veut pas dire que l’Église les condamne, qu’ils ne pourront pas être sauvés, ou qu’elle pense que ces fidèles sont nécessairement en dehors de l’amitié de Dieu, qu’ils ne peuvent pas être en état de grâce. Elle leur refuse les sacrements, parce que les sacrements sont les signes visibles de l’alliance et du salut que ne peuvent pas recevoir ceux qui ne remplissent pas toutes les conditions pour être dignes du Peuple nouveau de Jésus-Christ.
Les Évêques du Congo sont conscients des drames qu’occasionne la législation actuelle qui fixe les conditions requises. Mais, ils savent que leur Conférence n’a pas compétence pour revoir cette législation. Elle demande donc aux Congrégations Romaines de mettre tout en œuvre pour revoir les lois actuelles, afin de les mieux adapter à la vérité des différentes situations présentées dans notre document, en particulier :
En tout cas, il est important pour les fidèles, actuellement privés des sacrements, de savoir qu’ils font partie de l’Église, et que celle-ci est aussi pour eux le Chemin qui conduit au Salut. Plus que pour d’autres, il est important pour eux d’écouter la Parole de Dieu, de participer pour autant qu’ils le peuvent aux célébrations liturgiques ; leur prière, leur désir de pardon, leur désir d’union au Christ ne seront pas vains.
Ces moyens les aideront efficacement à vivre dans la foi, l’Espérance et la Charité au milieu de la communauté chrétienne.
Conformément aux vœux de Vatican II qui se propose de mieux adapter la liturgie aux nécessités de notre époque, au tempérament et aux conditions spécifiques des différents peuples, notre Conférence s’efforce d’intégrer les éléments culturels et traditionnels dans la liturgie :
Vatican II a suscité un mouvement de renouveau dans l’Église Universelle, qui porte déjà ses fruits en plusieurs domaines. Ce renouveau a entraîné et entraîne encore certaines remises en questions inévitables, d’autant plus que nous vivons dans un monde qui évolue, et nous tenons à communier à ses aspirations profondes et saines.
Le sacerdoce ministériel se voit pris dans ce renouveau, plein d’espoir, qui soulève cependant quelques interrogations tant dans l’Église Universelle que Locale. Fils de l’Église, membre du corps sacerdotal, le prêtre Congolais participe aussi bien aux espérances qu’aux questions concernant le sacerdoce.
Nous constatons, avec peine, que quelques problèmes que se pose l’ensemble des prêtres, harcèlent de plus en plus le prêtre Congolais. Aussi nous sommes-nous proposés dans notre document de la Conférence de répondre à l’une ou l’autre interrogation sur le sacerdoce ministériel et d’aborder certaines difficultés ayant trait surtout aux Statuts du Prêtre Congolais et à sa situation matérielle.
Pour l’essentiel de la mission du prêtre, nous vous référons au décret conciliaire sur la « vie et ministère des prêtres », n° 1 à 6. Configuré au Christ-Prêtre par l’onction de l’Esprit, le prêtre est « capable d’agir au nom du Christ-Tête en personne » ; « Il exerce publiquement pour les hommes, au nom du Christ, la fonction sacerdotale » par le ministère de la Parole, des Sacrements et de chef rassemblant les hommes en un seul Corps : le Corps du Christ, par son don total :
Le Prêtre Congolais vit aujourd’hui dans des conditions d’existences qui, sur le plan matériel, sont insuffisantes et même anormales. Si, en acceptant le sacerdoce, il accepte de vivre une vie modeste, un minimum est nécessaire pour assumer sa vie, ses engagements et ses fonctions sacerdotales. L’évolution du coût de la vie, l’aide à la famille, les nombreuses charges, l’insécurité, la différence entre prêtre Congolais et prêtre Étranger mettent le Prêtre congolais dans l’obligation pénible de devoir toujours demander de l’argent.
Selon le Décret « Presbyterorum Ordinis » (P.O.), le Prêtre Congolais, comme tout prêtre, cherche « à s’assurer un niveau de vie suffisant et digne » (P.O. 17,20,21), qui le libère des soucis matériels trop accaparants et le rende disponible pour le ministère.
Le Concile souhaite :
Le Prêtre Congolais a vécu jusqu’ici sur la Providence . Sa situation est peu rassurante et ne présente aucune garantie pour l’avenir. Les aspirants au sacerdoce ou à la vie religieuse ont des inquiétudes en ce qui concerne leur avenir.
Cette situation matérielle anormale où se trouve actuellement le Prêtre Congolais a retenu spécialement notre attention et nous avons décidé d’y porter un remède.
Cette charge incombe en dernier ressort à l’Évêque qui doit subvenir aux besoins de ses prêtres. Mais elle doit être aussi la charge de tout un chacun (le prêtre Congolais lui-même et la communauté chrétienne pour laquelle se dévoue le prêtre). La communauté essaiera de prendre en charge ses serviteurs.
L’amélioration de la condition du prêtre doit être l’affaire de tout le monde.
Les Évêques du Congo ont réfléchi sur le Décret sur l’Apostolat des laïcs (n°2 et 3) ; ils ont examiné quelle est la situation actuelle du laïcat et le rôle qu’il joue dans notre jeune Église. Ils ont voulu donner des directives précises pour que l’Église du Congo soit davantage le peuple de Dieu où chacun : Évêque, Prêtre Religieux, Religieuse, Laïc, tous baptisés du même Baptême dans le Christ, travaillent en commun au salut de leurs Frères Congolais.
Nous sommes invités, aujourd’hui, à découvrir l’unité vécue du peuple de Dieu dans la DIVERSITÉ et dans la COMPLÉMENTARITÉ des ministères exercés pour l’édification de l’Église.
Il y a une diversité de ministères (I Cor 12, 5) donnés en vue du bien commun. Nous sommes tous diversement responsables de la présence, de la vie et de la mission de notre communauté chrétienne.
Cette diversité et cette solidarité de tous les chrétiens devraient permettre le passage d’une Église reposant trop sur les épaules du clergé à une Église reposant activement sur la commune responsabilité des chrétiens.
Une enquête faite récemment a mis en évidence les points suivants :
Nous pouvons constater l’action du Saint-Esprit qui éclaire ainsi notre jeune Église sur le chemin qu’elle doit suivre.
Il est cependant nécessaire de noter quelques obstacles qui nuisent à la bonne marche de ces communautés :
L’effort de fondation, d’enracinement et d’admiration de ces communautés chrétiennes est à poursuivre, car nous le considérons comme une priorité vitale pour l’Église du Congo.
Pour être vraiment des cellules d’Église, elles doivent présenter les caractéristiques suivantes, que nous devons retrouver dans chaque communauté.
Chacune doit être :
+ Émile, Cardinal Biayenda, Archevêque de Brazzaville
le 6 novembre 1973
Dans la même rubrique