Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville

mercredi 28 mai 2025


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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

« L’Année du Cardinal va changer beaucoup de choses »

déclare l’Abbé Isidore Malonga-Vouvouka

Du mercredi 18 au vendredi 20 juillet 2007, le Comité de pilotage de l’Année du Cardinal Émile Biayenda a organisé des Journées portes ouvertes. A la fin de celles-ci, nous nous sommes rapprochés de M. l’Abbé Isidore Malonga-Vouvouka, membre dudit Comité pour qu’il édifie l’opinion publique sur le bien fondé de ces journées, ainsi que sur la modeste personne du Cardinal Biayenda.

La Mémoire Biayenda : M. L’Abbé Isidore Malonga-Vouvouka, vous êtes l’un des membres du Comité de Pilotage pour cette année souvenir dédiée au bon Cardinal Émile Biayenda, pouvez-vous nous donner le sens de ces trois journées que vous venez d’organiser ?

Abbé Isidore Malonga-Vouvouka : Merci pour le journal « La Mémoire Biayenda » qui a bien voulu porter son choix sur ma modeste personne, s’il faut répondre à votre question : Nous avons organisé cette activité dénommée : « Journées portes ouvertes pour la mémoire du Cardinal Émile Biayenda », afin de repenser sa vie en vue de voir de nos yeux et d’entendre de nos oreilles ce que le Cardinal a fait et qui nous mérite la grâce de la paix.

Beaucoup de gens ne jugent pas cela comme quelque chose d’important et certains mêmes disent : « ce n’est pas important ce qui se fait ». Ils négligent ces journées parce qu’ils ne comprennent pas encore la grandeur de Dieu, qui se reconnaît par la foi et par les œuvres.

La M.B. : M. L’Abbé, vous parlez de la grandeur de Dieu qui se reconnaît par la foi. Ma question est celle-ci comment cette foi agit-elle ?

A.I.M.V. : Le mystère de la foi agit par le mémorial, et Israël en est la présence de ce mémorial d’un Dieu qui est intervenu auprès d’un homme qui est devenu pilier de la foi : Abraham et après lui, il y eut un deuxième autre pilier de la foi, qui n’est autre que Moïse. Donc, la foi, est un mystère du mémorial. Un mémorial reproduit et nous réactive les grâces du passé.

La. M.B. : Tout cela c’est de la théologie. M. l’Abbé, le mystère de la foi c’est quoi ?

A.I.M.V. : Dans la Bible, la foi, c’est la lumière des événements qui sont arrivés. Les événements sont les activités qui arrivent. Alors, ces événements-là, révèlent Dieu. Le pilier de la foi, le n°1 de la foi en Jésus Christ fils de Dieu c’est Abraham.

La foi, ce n’est pas seulement savoir que Dieu existe, mais la foi s’est savoir que Dieu est à l’action, il est à l’œuvre et Jésus nous dira cela.

Voici comment Dieu est à l’œuvre pour que nous puissions comprendre que Dieu était à l’œuvre dans la vie de papa Cardinal Émile Biayenda depuis le sein de sa mère. Cet homme-là qui est un homme de foi est un événement de Dieu. Dieu l’avait choisi pour manifester la grâce de la paix. Voici comment !

Nous pouvons commencer avec le père de la foi. Abraham est né là où se trouve l’Irak maintenant. Et puis, un jour son papa décide d’aller chercher un pays à l’occident. Il a ramassé sa famille et ils ont marché quelques dizaines de kilomètres, le papa tombe malade, il va mourir. Abraham va l’enterrer, mais Abraham va dire, « il faut que je continue la pensée de mon père » et il va marcher du côté de l’occident.

Ayant pris cette responsabilité d’aller vers un pays qu’il ne connaissait pas, le Dieu vivant qui dirige les événements de la vie apparaît à Abraham et lui dit : qu’il était le Dieu vivant qui a fait le ciel et la terre…vous n’avez qu’à lire la Bible et vous trouverez ce que je vous dis.

Nous ne sommes pas nés du hasard : que ce soit Abraham, que ce soit Tâta Biayenda, c’est un programme de Dieu, élaboré de toute éternité pour sauver notre pays qui est aussi un plan vivant de Dieu.

Le deuxième pilier de la foi, c’est Moïse, un autre événement de la foi comme Abraham, et le Cardinal Biayenda, il est aussi un événement de foi, une activité de Dieu. C’est Dieu qui vient par Moïse pour sauver son peuple, il va le dire à Moïse, quand il le rencontre au Buisson ardent. Mais celui qu’il va rencontrer au buisson ardent, il l’avait déjà choisi depuis le ventre de sa mère. Vous connaissez bien l’histoire de Moïse. Imaginez la suite.

Pour nous chrétiens, St Jacques nous dit, « la foi sans les œuvres est une foi morte ». Donc, ce sont les œuvres qui manifestent que celui-ci est un homme de Dieu, il fait du bien. Au vu de tout ce que Émile Biayenda a fait sur cette terre, l’Esprit de Dieu nous a poussé d’organiser quelque chose. C’est pourquoi en sa mémoire nous avons initié à travers l’Archidiocèse une année de souvenir pour le Cardinal Biayenda, qui est nous l’avons dit, un événement de foi pour la paix, car sa vie durant, Émile Biayenda était un être pacificateur, il est né instrument de paix.

Alors, en lançant cette année, nous avons voulu faire mémoire de cet homme de paix qui s’est mis à la suite de son Maître Jésus et qui s’est donné en sacrifice comme lui pour la paix.

Sur les traces de ses pères dans la foi, Tâta Biayenda avait en lui, une foi vivante centrée sur le Christ Jésus à travers la vie des hommes.

La M.B. : A propos de la foi vivante qu’avait le Cardinal Biayenda envers ses frères. Pourriez-vous nous donner un exemple palpable ?

A.I.M.V. : Je me souviens encore comme si c’était seulement hier, lorsque nous tenions nos réunions dans un lieu fermé, et lorsque l’Abbé, Mgr, puis le Cardinal Biayenda voyait un pauvre qui faisait des va et vient. Vous le voyez se lever pour aller à la rencontre de cette personne. Et nous de dire, « Biayenda, mais comment, occupe-toi d’abord de ce que nous faisons ! ". Lui de répondre, " mais il y a quelqu’un qui tourne-là ».

C’est pour vous dire qu’il était centré sur le Christ à travers les vivants et son cœur était dans la main. Dès qu’il était en face d’une situation pareille, il s’approchait pour servir cette vie. En tout cas, je suis très à l’aise de vous dire que Tâta Biayenda a servi la vie en esprit et en vérité. Il était tout au pauvre, il était la gentillesse même au milieu de nous. Gentillesse qui veut dire, tout tourné vers les gens, il ne négligeait personne, parce que chaque personne chez lui est un événement de Dieu, un passage de Dieu, une présence de Dieu (Mt 25,40).

La M.B. : Si nous suivons bien vos propos, donc vous confirmez que Tâta Biayenda était un homme de paix ?

A.I.M.V. : Mais bien sûr, il avait été choisi dès le sein de sa mère comme nos pères dans la foi, pour venir apporter la paix. Il n’y a qu’à lire son dernier message que nous pouvons appeler le testament du Cardinal Émile Biayenda au peuple congolais. « A tous nos frères Croyants, du Nord, du Centre et du Sud, nous demandons beaucoup de calme, de fraternité et de confiance en Dieu, Père de toutes tribus, afin qu’aucun geste déraisonnable ne puisse compromettre un climat de paix que nous souhaitons tous ». Un texte plein de sens !

La M.B. : M. L’Abbé, Tout au début vous vous êtes posé la question à la place de certaines personnes qui disent : « l’Année du Cardinal va changer quoi ? »

A.I.M.V. : A tous ceux qui se posent cette question, je leur réponds ceci : En cette année du Cardinal, nous sommes en train d’élever vers le ciel la Coupe du Salut en invoquant le nom du Seigneur sur le sang de Tâta Biayenda.

C’est pourquoi, je dis à tous : de bien célébrer cet événement, parce que ce qui a été hier, Dieu le rendra présent aujourd’hui. Ce même sang versé hier, nous allons le réactiver aujourd’hui, pour qu’il apporte au peuple congolais la paix que nous souhaitons tous.

En voulant faire ce rappel de la mort du Cardinal Émile Biayenda, écoutez-moi bien : « on ne veut condamner personne ». Émile Biayenda, lui, a été choisi non par ses accompagnateurs à la mort, ses bourreaux, mais par Dieu pour que le pays ne sombre pas dans la guerre, et qu’à travers le sang de sa vie qu’il fasse et obtienne la paix, à la suite de la mort du président de la République. Vous ne pouvez pas le nier. Ce n’est pas une autre personne qui pouvait le faire à cette époque. C’est bien lui, que Dieu avait choisi. Voilà !

Noter que, lorsque le climat était devenu trouble dans le pays, les gens sont allés le voir pour qu’il puisse se déplacer de sa résidence de l’Évêché. Et lui de dire, « je vais fuir ! Mais à qui je vais laisser paître les brebis du Seigneur. Vous me demandez à Moi d’aller me cacher, mais alors les autres. Non, laissez ! ». Et le frère Marie Alphonse de lui dire : Éminence, bonne chance !".

Et le jour où on est venu le prendre, lui était dans la maison. L’Abbé Badila intercepte les gens qui le cherchaient. Il leur dit : « qu’est-ce qu’il y a ? » Ils lui répondirent : « On a besoin du Cardinal ». Étonné de la réponse, l’Abbé Badila leur dit encore : " Mais le Cardinal, lorsqu’on le convoque c’est moi qui le conduit « . Et pendant qu’ils discutaient le Cardinal sort et dit " tâta Badila qu’est-ce qu’il y a ? ». Il descend.

Pendant que l’Abbé essayait de lui brosser la situation, il lui dit « Bika kua ndjendi" (laisse moi partir). Il savait la suite et il a dit : "Mais, ma vie, nul ne me la prend si ce n’est Dieu qui me l’a donnée ». Il est parti.

Donc, nous ne devons pas le regretter, parce que nous avons aujourd’hui un avocat qui désormais pourra intercéder pour nous, maintenant. Mais comme notre Église est une structure bien organisée et ordonnée, nous attendons que Rome le déclare officiellement à la face du monde.

La M.B. : Nommé Cardinal, vous l’avez accompagné avec l’Abbé Békiabéka à Rome pour son Sacre. Que retenez-vous encore de cette cérémonie ?

A.I.M.V. : Tâta Biayenda a frappé les gens à la cérémonie. Ils étaient deux africains. La simplicité de sa personne faisait entendre. « Celui-là est papabile, papabile ! ». Quand nous avons été reçus pour célébrer dans son église à Rome, la foule des Italiens disait : « " Tanto buono ! » (qu’il est si bon).

Le Cardinal Émile Biayenda au centre et à l’extrême droite l’Abbé Isidore Malonga suivi de l’Abbé Békiabéka

La M.B. : Vous êtes l’initiateur de la grotte Mariale de la paroisse Notre-Dame du Rosaire de Bacongo. A la fin des travaux, vous avez invité le Cardinal Émile Biayenda à bénir ce lieu de méditation et de prière. Qu’avait-il laissé en ce lieu comme souvenir ?

A.I.M.V. : En voila encore un événement de Dieu, un événement de foi vivante. Jeune vicaire en cette paroisse mariale à l’époque, je conçus l’idée d’implanter physiquement la présence de Maman Maria et dans l’église et dans la cour. En pleine messe, je lançais l’idée de bâtir une grotte à Maman Maria. Les chrétiens ont vivement applaudi l’initiative. Pendant la messe suivante celle de 10 heures, une famille avait déjà déposé deux camions de pierres ; c’était la famille Tomadiatounga Thomas. Je n’avais pas de Vierge de Lourdes. Les semaines qui ont suivi, l’abbé Firmin Bitsindou me proposa une Vierge de Lourdes.

Tâta Biayenda revenu de Lourdes m’a apporté une pierre de Lourdes, afin que cette pierre soit incrustée dans la parois de la grotte ; on fera couler sur cette pierre de l’eau ; le jour de la consécration de la grotte, le Cardinal avait demandé que cette eau soit bénie comme l’eau de Lourdes.

En outre Tâta Biayenda a demandé que la Sainte Vierge de cette grotte obtienne grâces et bénédictions pour les couples et les familles chrétiennes et pour les vocations religieuses et sacerdotales.

La M.B. : Pour vous, qui était le cardinal Émile Biayenda : un prophète, un homme de Dieu ou un homme d’Église tout court ?

A.I.M.V. : Pour moi, Tata Biayenda a bien réalise dans sa vie, l’idéal spirituel du baptisé. En effet le jour du baptême, le nouveau baptisé est sanctifié avec l’huile du St Chrême en ces termes : « Tu es devenu membre de Jésus Christ, prêtre, prophète et roi ». Par sa prière d’intercession, le disciple du Christ fait entendre l’appel de Dieu dans le cœur des ouvriers choisis par Dieu pour être envoyés à la Moisson du Seigneur (Mt 9,38).

Mais cet idéal du membre du Christ est merveilleusement réalisé quand le baptisé du Christ va présenter son offrande à la messe, le repas pascal et messianique, où le pain de la sueur de son front devient « chair du Christ pour nourrir la vie du monde », dit Jésus (Jn 6,51). Là dans le Christ, les baptisés deviennent en plénitude, le royaume des prêtres, des prophètes et des rois qui intercèdent, éclairent et nourrissent tous les vivants de la Terre (Ex 19,5 ; Mc 6,37 ; 1Pi 2,4-6, cf Jn 21,15).

Le cardinal, lui, l’a été par le sang de sa croix qui a attiré tous les hommes au Christ par les biens de la paix (Jn 12,24-33).

La M.B. : Pour terminer M. l’Abbé, y-a-t-il une préoccupation que nous n’avons pas pu évoquer tout au long de notre entretien ?

A.I.M.V. : Oui ! Une préoccupation qui est une préoccupation de taille, parce que ce qui me préoccupe explique le triomphe du Prince des ténèbres qui « caporalise » toute la vie du monde. La foi des baptisés est devenue trop superficielle, parce que l’Évangile n’est Évangile du Bon Berger qui donne sa vie en rançon pour la multitude comme le Cardinal en donne l’exemple (Jn10,10+ ; Mt.20,28).

Le chrétien n’est plus formé à l’Évangile qui est « Bonne Nouvelle du salut c’est-à-dire la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres (qu’au nom de Jésus, les baptisés, les disciples de Jésus vont s’occuper de leurs besoins !), Car Jésus de Nazareth qui a passé en faisant le bien a dit : « qui vous accueille, m’accueille » (Mt 10,40+). Ce qui veut dire : « la présence du Chrétien est présence vivante et réelle du Sauveur envoyé par le Père pour "aider les hommes » à s’aimer les uns, les autres, à se prendre en charge comme commencèrent à le faire les premiers chrétiens et tel que Mère Térésa de Calcutta a fait (Jn 13,34-35). Les catéchumènes ne sont plus formés à l’exigence fondamentale au bien concret dans la vie, eux dont sortiront chrétiens laïcs, religieux et prêtres de l’Église.

Or c’est la vie du bien qui exorcise le mal selon le mot de St Paul : « Vaincre le mal en faisant le bien ». Les chrétiens doivent redevenir événements de foi au Christ vivant qu’ils incarnent en eux en chair et en os (Jn 6,56-57).

Que l’Esprit qui animait le Bon cardinal Émile Biayenda souffle de nouveau sur l’Église pour que les chrétiens à tous les niveaux président à la charité dans la société comme l’a fait Térésa de Calcutta.

Propos recueillis par Grégoire YENGO-DIATSANA

 




 
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