Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville

jeudi 28 novembre 2024


L'église Ste Anne


Mgr THÉOPHILE MBÉMBA


Mgr BARTHÉLÉMY BATANTU


L'église St Pierre Claver


Mgr ANATOLE MILANDOU

LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

Les Scolastiques Jésuites à kimwenza en RDC, font mémoire de leur vénéré Pasteur

A la suite du Cardinal Émile Biayenda, l’Église doit dénoncer tout sectarisme et tribalisme nuisibles

En union de prière avec l’Église du Congo, les Scolastiques Jésuites de la Faculté de Philosophie Saint Pierre Canisius ont fait mémoire du Cardinal Émile Biayenda. Le 22 mars 1977, quatre jours après l’assassinat du président Marien Ngouabi, le Cardinal Émile Biayenda subissait son martyr par les mêmes bourreaux que ceux du président de la République. Trente ans après, le sang de nos frères martyrs Ngouabi, Biayenda et Massamba-débat accuse le peuple congolais. En témoigne la situation chaotique et déplorable que vivent les congolais. Neuf ans après la fin de la guerre du 18 décembre 1998, le pays ne semble pas décoller vers le progrès et surtout l’unité nationale tant prônée par le Cardinal.

C’est pourquoi, l’Église du Congo, le jeudi 22 mars 2007, de la quatrième semaine du temps de carême, a offert le sacrifice du Christ qui seul sauve le monde et lui garantie la paix. Elle y associe l’humble oblation du Cardinal Émile Biayenda, il y a trente ans, pour que le Congo renaisse de sa léthargie, de sa paresse et de sa bureaucratie.

Ce même jeudi, quelque part à Kinshasa, au Plateau des Vierges, Kimwenza, tout le scolasticat, pendant la messe de 18h30 a prié pour le Congo Brazzaville et aussi pour l’avancement de la Cause de béatification et de canonisation du Cardinal Émile.

Dans la modeste chapelle du scolasticat, une photo du Cardinal Émile, ornée de fleurs reposait au bas de l’autel. La procession d’entrée rappelait une atmosphère de deuil, de pénitence et de prière.

L’antienne d’ouverture était extraite du psaume 104, les versets 3 à 4. : « Soyez dans la joie vous qui cherchez Dieu. Cherchez le Seigneur et sa face, sans vous lasser, recherchez son visage ». Nous y avons discerné une invitation pour le Congo à persévérer dans la recherche de la face de Dieu. Que recherchent les congolais ? L’embourgeoisement ? Les honneurs, l’individualisme, le sectarisme ?

Quant à la prière qui s’en suivit après l’acte pénitentiel, elle fut révélatrice des intentions de tout le scolasticat pour le Congo : « nous t’adressons, Seigneur, cette humble prière : que tes serviteurs se purifient dans la pénitence et s’appliquent à faire ce qui est bon ; donne-leur de rester dociles à tes volontés et d’arriver sans encombre aux fêtes de pâques. Par Jésus Christ ».

Voilà, il me semble, le message qu’Émile Biayenda nous adresserait aujourd’hui. Ce serait sa prière pour la situation pathétique du Congo : la purification dans la pénitence et la pratique de la charité, du Bien.

Que le Congo se purifie de ses crimes, de ses vols, de son sectarisme, de sa bureaucratie.

Que le Congo se purifie de sa gestion opaque du Bien Commun, et qu’il s’applique à faire ce qui est bien. Ici le Bien qui serait méritoire n’est pas celui qui consiste à donner des quêtes à l’Église, ou à donner de notre superflu aux nécessiteux pour nous apaiser la conscience. Ce bien est celui qui remet l’homme debout : bien envers soi-même et bien envers autrui.

Le bien envers soi-même revient à agir selon la morale, agir de sorte que ma dignité et ma condition d’homme ne soient pas dégradées. La honte de nous-mêmes, la conscience de notre médiocrité et hypocrisie seront les signes révélateurs d’un appel à la conversion, appel à rectifier le tir. C’est finalement rechercher l’unité, promouvoir le travail et faire hâter le progrès.

Le bien envers autrui serait d’agir en sorte que l’autre soit édifié par mon action. Agir en reconnaissant que l’autre et moi sommes intimement liés et que nous partageons tous les deux le même idéal : celui de l’épanouissement et du bien être social. Il nous faut comprendre que nous sommes responsable de l’autre, que l’autre est mon frère et ma sœur et que cet autre, c’est finalement moi tel que j’aurai apparu dans d’autres circonstances autre que ma fortune actuelle, selon la loi de la contingence. Cela devrait nous maintenir dans la tolérance et le partage. Ce n’est que de la sorte que nous pourrons voir Dieu dans les autres. Nous n’aimerions non pas une idée suffisante de Dieu dans l’autre, comme le rabâchent les catéchumènes, mais l’autre dans sa singularité, tel que je voudrais qu’il goûte à la joie, au bonheur que je savoure.

Par ailleurs, l’eucharistie a continué par la liturgie de la parole.

Le psaume méditatif pris au chapitre 105, était un cri d’espérance. Ce cri est celui que lance aujourd’hui toute l’Église du Congo et aussi tout le scolasticat jésuite : " souviens-toi Seigneur de nous par amour de ton peuple ". Nous pourrions dire, souviens-toi Seigneur du Congo par amour pour les présidents Youlou, Ngouabi, Massambat Débat. Souviens-toi Seigneur du peuple congolais et de toute l’Église du Congo par amour pour Monseigneur Théophile Mbemba, le cardinal Émile Biayenda, Messeigneurs Benoît Ngassongo, Godeffroy Émile Poaty, Georges Firmin Singha, Barthélemy Batantu. Et enfin souviens-toi de nous pour les prélats Dénis Moussavou, Louis Badila, Noël Ognié.

L’Évangile du jour était tiré de Jean au chapitre 5 les versets 31 à 47, un texte qui dénonçait l’insensibilité des juifs face au témoignage de Jésus Christ. Nous pouvons nous demander ce que le Congo fait de tous ses témoins ? Témoins du Christ, de la justice, du bien être social, etc. Que faisons-nous de tous ces témoins de l’amour ? Au soir de notre vie, nous serons jugés sur notre attitude face à l’amour qui avait frappé à la porte de notre cœur et auquel nous n’aurions pas répondu.

Juste après l’Évangile, il n’y eut pas d’homélie, mais un compagnon jésuite du Congo Brazzaville nous a présenté son témoignage sur la figure emblématique du Cardinal Émile Biayenda. Depuis sa naissance en 1927 à Malela-Bombé, dans la région du Pool, en passant par le petit séminaire, le sacerdoce, son sacre d’évêque de Brazzaville en 1970 et sa création de Cardinal par Paul VI en février 1973 ; jusqu’à son assassinat le 22 mars 1977. Au-delà de tout commentaire, nous avons retenu qu’Émile était un modèle de foi. Modèle d’une Église militante pour sauvegarder la paix et l’unité nationale. Le commentateur a aussi évoqué son message le plus pacificateur, la veille de sa mort, son testament spirituel en quelque sorte pour le Congo plongé dans les affres d’un communisme béat : « A tous nos frères croyants du Nord, du centre et du Sud, nous demandons beaucoup de calme, de fraternité et de confiance en Dieu, Père de toutes races et de toutes tribus ; afin qu’aucun geste déraisonnable ne puisse compromettre un climat de paix que nous souhaitons tous ».

Il me semble que l’Église du Congo devrait faire sienne ces paroles du Cardinal et les redire constamment à tout le peuple congolais, surtout en tant de crise. Il ne suffit pas de commémorer le souvenir d’un saint homme. Il revient au contraire de continuer son œuvre et son action en dénonçant sous quelque forme que ce soit toute dégradation de paix, d’unité nationale. Il s’agit de dénoncer tout sectarisme et tribalisme nuisibles à la cohésion nationale et donc au développement. En ce sens, l’Église du Congo, tout en gardant sa place de témoin du Christ et de signe eschatologique du Royaume avenir, pourra bien cheminer en toute liberté, sans mélange ni complaisance encore moins de corruption, dans l’histoire des hommes, en vivant avec et pour eux leurs joies et peines jusqu’à ce que le Maître de la vie et de l’histoire, - Dieu notre Créateur, par Jésus Christ notre Seigneur et Sauveur, avec la Puissance de l’Esprit Saint, - achève tout en lui.

Le Cardinal n’attend pas de nous qu’on passe le temps à célébrer sa mémoire dans des discours nostalgiques d’un passé tragique qu’on ne peut changer. Il nous demande, nous en sommes convaincus, qu’à chaque souvenir de sa mort, que cela soit pour nous un nouveau départ vers un agir meilleur, une conversion nouvelle de notre paresse et parfois de nos langues de bois à dénoncer toutes les structures de péchés. Il veut que nous fassions notre, son grand désir d’unité et de paix pour le Congo.

Le Cardinal Émile Biayenda est mort au temps de carême, synonyme de pénitence, de prière, de jeûne et de partage. Il a versé son sang dans un contexte de crise nationale et de tension. L’Église du Congo et tout le Congo devrait l’adopter comme intercesseur (comme saint patron quand Dieu nous en donnera la grâce), à coté de la Vierge Marie que le Cardinal avait tant aimée. Afin de recourir à son intercession surtout en tant de crise et de conflit. Qui sait si Dieu n’aura pas pitié du Congo par la prière de ce saint homme et la médiation de la Très Sainte Vierge Marie.

Enfin, l’eucharistie a pris fin à 19h45 par un chant à la Vierge Marie. Ce fut une invitation à nous associer aussi à la prière de Notre Dame du Congo par le chapelet, pour nous ouvrir à l’espérance d’un Congo nouveau où l’unité nationale ouvre la voie au travail, et le travail nous conduisant droit aux parvis du progrès. N’est ce pas la devise que la République du Congo s’était proposé d’adopter le jour de son indépendance ?

Dubrey GANGA sj.

 




 
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