vendredi 21 mars 2025
« Pourquoi quitter l’évêché ? J’y suis, j’y reste »
Le vendredi 18 mars 1977, le président de la République, le Commandant Marien Ngouabi reçoit, en audience, le cardinal Émile Biayenda pour une affaire du terrain de Javouhey. Cette audience initialement prévue pour 9h30 est reportée à 13h3O par la suite. Les deux hommes se sont rencontrés et à la fin de cette entrevue, le Cardinal Émile Biayenda prend congé de son hôte. Une heure après cette rencontre, retentissent les coups de feu du côté, de l’État Major. Et l’on apprendra le lendemain, la nouvelle de la mort du président de la République.
Le mardi 22 mars 1977, le Cardinal était enlevé et froidement assassiné, quelques heures plus tard. Il laissait, au peuple congolais, ce message de paix, en quelque sort son testament et la conclusion de sa mission évangélique parmi nous. « A tous nos frères croyants, du Nord, du Centre et du Sud, nous demandons beaucoup de calme, de fraternité et de confiance en Dieu. Père de toutes races et de toutes tribus, afin qu’aucun geste déraisonnable ne puisse compromettre un climat de paix que nous souhaitons tous ».
Lors de sa venue à Brazzaville, le 5 mai 1980, le pape Jean Paul Il s’est incliné ur la tombe du Cardinal Émile Biayenda. Depuis 1996, sa cause de béatification et de canonisation a été initiée au niveau diocésain et introduite à Rome depuis juillet 2003.
Pasteur de son peuple, telle est la première qualité qui émane de la personne du Cardinal et l’objet essentiel de sa mission. Au mois de décembre 1975, deux ans après avoir été créé Cardinal par le Pape Paul VI, le Cardinal Émile Biayenda confirme l’ardeur apostolique qui l’habite depuis toujours : fidélité au Christ et à son enseignement ; amour du berger pour chaque brebis du troupeau. Un amour qui conduit au sacrifice pour lequel il se tient prêt : en Jésus Christ, nous découvrons que la liberté est la joie de pouvoir donner sa vie aux autres jusqu’au don total de soi (Noël 1975).
Lors de la cérémonie de clôture des travaux de la Conférence des Évêques de l’Afrique Centrale (CEAC) qui s’est tenue à Brazzaville, en février 1977, devant les menaces d’orage qu’il sent monter sur la nation et qui portent les germes mortels de la division, il évoque ce passage du prophète Osée : « Mon peuple est malade de son infidélité, comment l’abandonnerais-je ! Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère, car je suis Dieu, et non pas un homme ».
Ce jour-là, 20 février 1977, nous sommes des milliers à le regarder parler, mais sans le voir, sans l’écouter vraiment. Humblement, le Cardinal fera abstraction de la dernière phrase de ce verset : « Au milieu de toi se lève Celui qui est Saint ! ».
La suite de son enseignement s’adresse aux chrétiens d’aujourd’hui, à qui il lance ce pathétique appel dont, tels les pèlerins d’Emmaüs, nous ne comprendrons que plus tard l’importance : « Plus que les manuels ou les méthodes à utiliser, l’urgence réside dans le témoignage de foi réellement vécue. Nos pays attendent des hommes et des femmes convaincus, habités par l’Esprit, qui le montrent par leur vie et par leur comportement ». Puis, il évoque l’ampleur de la tâche et la responsabilité que lui confie l’Église. Trouvera-t-il suffisamment d’ouvriers pour assurer la moisson ? « Qui enverrai-je auprès des enfants, des tout-petits ; auprès de jeunes des écoles, des lycées et universités, auprès des analphabètes, auprès des adultes des campagnes et des villes, auprès de la classe ouvrière auprès des fonctionnaires, auprès des responsables politiques, auprès de ceux qui m’ont tourné le dos ? ».
Au soir du 22 mars 1977, tout es consommé. « J e préfère donner ma vie comme le Christ, au lieu de quitte, l’Archevêché », disait-il la veille de sa mort, alors que son entourage pressentant que sa vie était en danger le pressait de quitter Brazzaville. A l’exemple de Jésus, son maître, il a accepté le sacrifice. J’y suis, j’y reste » Sa mort tragique a été douloureusement ressentie au Congo et hors des frontières. Mais l’évangéliste Jean nous le rappelle : « Si le grain de blé tombe en terre meurt, il donne ensuite beaucoup de fruits ».
Le Cardinal Paul Zoungrana Archevêque de Ouagadougou (Burkina) rend à son confrère et ami le Cardinal Biayenda, le 4 novembre 1994, ce, hommage posthume : « Son Éminence le Cardinal Émile Biayenda a été un homme de Dieu, tout donné au service pastoral pour le bien du troupeau qui lu était confié... Il a été aussi l’homme des hommes, fils de Dieu. En effet, par sa charge épiscopale, il avait pour mission de rassembler ses compatriotes dan, « la fraternité humaine et chrétienne » don il voyait la source dans l’amour du Cœur de Jésus. Il est évident, m’a écrit le Cardinal Biayenda, que cet amour ne se limite pas aux seuls chrétiens. Depuis toujours, à l’exemple de Jésus qui es venu renverser toutes les barrière claniques, tribales, raciales et religieuses, l’Église répond à toutes les demandes que lui adressent les hommes dans le besoin et dans la nécessité. Ces paroles, conclut le Cardinal Zoungrana, prennent aujourd’hui, une dimension prophétique dans le contexte actuel où vivent bon nombre de nos pays africains, en quête douloureuse d’unité, d’entente, de dialogue et de fraternité dans la paix ! » Après les différents événements douloureux qu’a vécus le Congo Brazzaville, cette vie exemplaire du Cardinal Émile Biayenda restera, pou nous, comme pour les générations futures, l’idéal vers lequel nous devon tendre : la construction d’un monde plus juste et plus fraternel.
De nombreuses associations, fondations, fraternités, confréries ont vu le jour après la mort du Cardinal Biayenda Elles tendent à perpétuer son souvenir et surtout, à poursuivre son œuvre par la fidélité à son amour pour tous les hommes.
Gabriel SOUNGA-BOUKONO
ACEB-France
Au mois de juillet 2006, la FOCEB Côte d’Ivoire célébrera les onze ans de leur existence. Les principales activités de cette fondation sont : la prière pour la Cause pour la Béatification et de la Canonisation du Cardinal Émile Biayenda et le chant à travers la chorale congolaise.
Cette fondation est basée dans le quartier Cocodi et anime les messes du 41, dimanche du mois à 19 heures. L’abbé Guy Roland Nkounkou est l’aumônier de la FOCEB et l’abbé Raphaël Souroukou, aumônier pastoral paroissiale.
Dans la même rubrique