dimanche 24 novembre 2024
Le clergé congolais n’est pas différent aux problèmes qui se posent au prêtre d’aujourd’hui. Il sait que l’on parle, ici et là, de la « crise d’identité » du prêtre. Le prêtre, paraît-il, ne sait plus ce qu’il est. Mais, si le prêtre ne sait plus ce qu’il est, c’est peut-être parce qu’il ne sait plus ce qu’il doit faire. Aucun maçon ne peut se demander qui il est, s’il sait qu’il est celui qui doit bâtir les maisons dont les hommes ont besoin.
Le prêtre lui, que fait-il ? Pour moi, je ne sais pas exactement ce que dit la théologie, soi-disant, « d’après Concile »... Je m’en tiens à ce que disait la théologie d’hier, dite « dépassée aujourd’hui ». Elle disait en effet : « Sacerdos alter Christus » (le prêtre est un autre Christ). C’est une expression très dense de sens et de signification.
Le prêtre, un autre Christ ! Il faudrait donc nous demander assez durement : qui est le Christ ? Le Christ, c’est l’Envoyé du Père ; le prêtre doit se considérer, jusque dans sa psychologie, comme un envoyé, un apôtre, à la manière et à l’exemple du Christ. Le Christ, c’est le porte-parole de Dieu ; il annonce le Père et par sa parole et par sa vie de service : « je suis parmi vous comme celui qui sert ». Le prêtre, donc, doit être celui qui annonce Dieu, à la manière et à l’exemple du Christ et par la parole (« Malheur à moi si je n’évangélise pas » disait Saint Paul) et par la vie de service et de charité.
Le Christ, c’est celui qui fait la volonté du Père. Et que veut le Père ? Le Père veut que ce monde soit dans l’ordre. Le Christ, c’est celui qui annonce la loi de l’ordre : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Ne fais pas à l’autre ce que tu ne veux pas que lui te fasse » (...) Alors, le Prêtre, comme le Christ, sera celui qui fait et annonce la volonté du Père ; celui qui proclame par sa parole et par sa vie.
« Aimons-nous comme des frères ». Le Prêtre, c’est le Christ qui unit, qui rassemble les hommes divisés par la haine. Le prêtre, c’est celui qui réconcilie ceux qui se sont brouillés. C’est en me considérant humblement, sans prétention aucune, avec toute ma faiblesse, comme « alter Christus », que moi, prêtre, je sais qui je suis et ce que je dois m’efforcer de vivre chaque jour.
En résumé, comme le Christ, je suis envoyé, apôtre, je dois annoncer la Parole de Dieu, je dois faire ce que Dieu veut, à savoir unir les hommes par la loi d’amour comme les enfants d’un même Père. Et cela, le monde en a besoin, en aura toujours besoin autant qu’il a besoin de nourriture et d’argent. Et cela, c’est du travail capable d’occuper pleinement une vie humaine, tout un prêtre, et c’est là toute sa vie.
On parle beaucoup du célibat du prêtre. Ici encore, la définition « Sacerdos alter Christus » aide à comprendre cette attitude qui n’a de valeur qu’en référence avec le Royaume de Dieu. Il est tout à fait évangélique d’essayer d’imiter le Christ, Lui qui, de condition divine, s’est fait obéissant comme le dernier des hommes, prenant la condition d’esclave. Le prêtre aussi, de condition humaine, peut ne pas regarder comme une proie ce qui l’élève au rang des autres hommes, et se faire passer pour le dernier des hommes à cause du Royaume de Dieu. Le Christ dit à ses Apôtres : « En vérité, celui qui quitte son père, sa mère, ses enfants, ses champs, recevra le centuple ». Il dit aussi : « Va, vends tout, donnes-en le prix aux pauvres, ensuite, viens et suis-moi ». Tout cela peut permettre à un prêtre de quitter même la joie du foyer pour la cause de l’Évangile, comme l’ont fait les premiers Apôtres.
On parle aussi du prêtre salarié. Évidemment, il y a la générosité de la communauté chrétienne qui doit comprendre, comme dit le Christ, que « l’ouvrier a droit à son salaire » et que « l’apôtre mangera ce qu’on lui présentera : « Dans quelque maison où vous entrez, mangez ce que l’on vous présentera » dit le Christ.
L’Église, communauté chrétienne, a le devoir de subvenir aux besoins essentiels de ses prêtres et elle essaie de le faire, mais, ce n’est pas toujours facile et surtout dans nos pays de mission où la vie est en train de s’organiser et où la population est souvent très pauvre. Certes, il y a cette attitude de mendicité qui gêne le prêtre, mais n’est-ce pas le respect de la pauvreté évangélique qui contribue à l’amour de l’Évangile ?
Somme toute, un prêtre se doit de ne pas oublier la Parole du Christ : « Qui veut sauver sa vie, la perdra, mais qui accepte de la perdre à cause de moi, la gardera en vie éternelle ».
+ Cardinal BIAYENDA Archevêque de Brazzaville,
(République Populaire du Congo)
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