Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

« Nos pays attendent des hommes et de femmes convaincus, « séduits par Dieu » »

Association des Conférences Épiscopales du Congo, de la Centrafrique et du Tchad, de février 1977 à Brazzaville

En février 1977, les évêques membres de l’Association des conférences épiscopales du Congo, de la Centrafrique et du Tchad se sont retrouvés à Brazzaville du 10 au 20 février 1977 pour les travaux ordinaires de leur institut sous-régional avec comme thème : « Évangélisation et catéchèse ».

C’était aussi la toute dernière réunion à laquelle le Cardinal Émile Biayenda avait pris part quelques jours avant sa mort. Nous publions un extrait de l’homélie de l’Archevêque de Brazzaville dite en la Cathédrale Sacré-Cœur lors de la messe de clôture.

 

Comme vous le voyez, mes frères et sœurs dans le Christ, tous ceux-là ont été séduits, un moment par le Seigneur mais divers motifs ont contribué à leur perte. Ce drame, nous, vos Pasteurs et Pères, le ressentons encore avec plus d’anxiété. Aussi notre Session a-t-elle eu pour thème « Évangélisation et Catéchèse ».

Pendant dix jours, nous avons, ensemble, passé en revu des divers problèmes auxquels s’affrontent nos jeunes Églises ; nous avons échangé expériences et projets, essayé de chercher les voies et moyens pour que l’Évangile du Christ soit non seulement entendu mais vécu par nos frères Tchadiens, Centrafricains et Congolais comme une réalité qui ne les aliène nullement, ni ne les dénature.

Parmi les diverses obligations qui nous incombent, trois ont spécialement retenu notre attention. Nous devons avoir :

- Une meilleure connaissance de nos diverses cultures, de nos traditions et coutume pour découvrir « les pierres d’attente » de notre religion, de notre foi ancestrale ;

- Une meilleure intelligence de la Parole de Dieu à transmettre, sans le trahir, pour qu’elle accomplisse et non point abolisse notre être africain ;

- Nous devons enfin avoir une connaissance exacte des divers courants d’idées modernes, athées pour la plupart, qui déferlent sur notre continent.

Plus que les manuels ou les méthodes à utiliser, l’urgence réside dans le témoignage de foi réellement vécu. Nos pays attendent des hommes et de femmes convaincus, « séduits par Dieu » qui le montrent par leur vie et leurs comportements.

« Qui enverrai-je, quel sera mon messager ! » demande le Seigneur. Qui enverrai-je auprès des enfants, des tout-petits, auprès des jeunes, des écoles, des lycées et universités, auprès des analphabètes, auprès des adultes de compagne et de ville, auprès de la classe ouvrière, auprès des fonctionnaires, auprès des responsables politiques, auprès de ceux qui m’ont tourné le dos ! Qui enverrai-je auprès de ceux qui abandonnent leur formation religieuse après la « profession solennelle », auprès de ceux qui, se coupent des sacrements en contractant mariage ou en s’engageant socialement !

Qui enverrai-je auprès de tous ceux qui m’ont renié, qui vivent dans le désespoir, dans les ténèbres pour les nourrir, tous, de ma Parole et du Pain de vie ! Qui sera mon messager dans tous ces milieux !

« Me voici, envoie-moi », devrions-nous tous répondre, malheureusement, nous sommes loin, pour la plupart, de faire preuve d’une pareille spontanéité, nous nous sommes laissés séduire par d’autre fausses divinités, par de multiples idoles. D’aucuns vont jusqu’à penser que le devoir d’apostolat, voir le témoignage de vie chrétienne, n’intéressent que les Évêques, les Prêtres, les Religieux, les Religieuses et quelque peu, les catéchistes et Laïcs engagés.

Nous avons, mes chers frères et sœurs, plus d’une fois, dénoncé cette erreur. Chaque baptisé est missionnaire comme nous vous le disions dans notre dernier message de Noël.

La crise des vocations particulières

Aussi, devons-nous féliciter et encourager ces deux jeunes filles qui ont eu le courage d’aller plus loin dans leur engagement de foi. Elles répondent généreusement : « Nous voici, Seigneur, tu nous as séduit, envoie-nous dans tous ces milieux ».

Permettez qu’ici, nous revenions sur une question qui n’a pas échappé à vos Pasteurs et Pères au cours de leurs travaux : la crise des vocations dans nos pays respectifs. Pourquoi manquons-nous de Prêtres, de Religieux et Religieuses. Dieu n’appellerait-il plus des jeunes gens et jeunes filles à son service ?

Non, mes frères et sœurs. Ainsi poser la question serait un véritable blasphème : Dieu continue à appeler, les vocations ne manquent pas, elles meurent. Et pourquoi meurent-elles ?

Là encore d’aucuns nous répondront que les jeunes manquent de générosité, qu’ils sont idéal ou victimes de mauvais exemples de leurs aînés. Nous le leur concédons volontiers, mais pourquoi ces jeunes sont-ils ainsi !

Reprenons le texte de Saint Paul : « Tout grand Prêtre, disons tout serviteur de Dieu, (Prêtre Religieuse et Religieux) est toujours pris parmi les hommes » (Héb.5,1). C’est la clef de notre énigme.

- Les milieux d’où sortent ces jeunes, ceux qu’ils fréquentent au cours de leurs années de formation favorisent-ils l’épanouissement de leur vocation ?

- Les aidons-nous à mieux saisir la beauté d’une vie donnée à Dieu ?

- Leur offrons-nous dans nos foyers les conditions nécessaires pour qu’ils découvrent la beauté des valeurs spirituelles ?

La responsabilité des foyers

A ce sujet, nous sommes obligés de reconnaître que les familles portent une très grande responsabilité dans le dépérissement des vocations. Il est des familles où l’on ne parle jamais de Dieu à l’enfant... a fortiori de la vie religieuse ou sacerdotale. Ainsi beaucoup de vocations se trouvent étouffées par le silence des parents. Très peu sont ces familles chrétiennes dont la prière se trouve centrée sur les vocations. Depuis que nous avons lancé la compagne de « Prière en famille », combien ont songé à prier le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa vigne.

Cardinal Émile Biayenda
20 février 1977

 

 


 
 
 
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