Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

IL Y A 35 ANS, LE CARDINAL ÉMILE BIAYENDA FUT ASSASSINÉ (4)

3. LE DEUIL

Mercredi 23 mars.

Dès le lever du jour, la « Voix de la Révolution Congolaise », à son habitude, énonce les plus récentes volontés du Comité Militaire du Parti. Hélas, au deuil national qui secoue tout le pays vient s’ajouter un autre : l’annonce officielle de l’assassinat du Cardinal Émile Biayenda.

Cardinal Émile Biayenda

L’insoutenable est là : en cinq jours, la République Populaire du Congo se hisse dans le tableau d’honneur ou de honte des assassinats célèbres. Qu’en sera-t-il avant la fin de la semaine ou du mois ? Personne n’ose plus y penser.

Dès 6 heures, la dépouille mortuaire du Cardinal Biayenda est déposée à la morgue municipale de l’Hôpital Général de Brazzaville. Ses bras gardent la même position qu’au cimetière d’Itatolo : main gauche sur la poitrine et la croix pectorale, main droite ouverte levée à la verticale : « Calmez-vous et faites la paix entre vous ! ».

De toutes les paroisses de Brazzaville, ainsi que des communautés chrétiennes des banlieues et des autres confessions religieuses chrétiennes, les fidèles envahissent la cour de la Cathédrale Sacré-Cœur, la Place mariale et les jardins de l’Archevêché. La stupeur, l’angoisse, la colère, la révolte, s’emparent de ceux et celles qui vont et viennent, sans trop savoir ce qu’ils veulent et font. C’est tout un peuple qui peuple, c’est toute une Église qui est transpercée.

«  A Rama, une voix se fait entendre, une plainte amère ; c’est Rachel qui pleure ses fils. Elle ne veut pas être consolée pour ses fils, car ils ne sont plus.  » (Jer 30,15).

A 9 heures, M. l’Abbé Louis Badila réunit les prêtres et les religieux présents à Brazzaville, pour les mettre au courant des événements et prendre les dispositions nécessaires. Il est décidé que les obsèques seront célébrées le dimanche 27 mars, que le Cardinal sera inhumé dans son église- Cathédrale et que – en guise de veillées funèbres – une messe de requiem sera célébrée chaque après-midi à 15 heures dans toutes les paroisses.

Abbé Albert NKOUMBOU
Extraits de son livre inédit
« Cardinal Émile Biayenda, martyr de la foi chrétienne au Congo »


 

Déclaration du Comité Militaire du Parti annonçant l’assassinat du Cardinal Émile Biayenda
(Mercredi 23 mars, au matin, lue par le capitaine Florent Ntsiba)

« Peuple congolais, dans la soirée du 22 mars 1977, son Excellence le Cardinal Émile Biayenda a été enlevé et sommairement exécuté par un groupe de trois personnes appartenant à la famille du Président Marien Ngouabi. Le 18 mars 1977, 30 minutes avant l’assassinat de Camarade Président Ngouabi, le Cardinal Biayenda avait été reçu par le Président de la République. Cette audience était régulièrement programmée. Et la relation de cause à effet entre l’assassinat du Camarade Président et l’audience accordée ne peut, en conséquence être établie. Assi, le Comité Militaire du Parti désapprouve-t-il entièrement de tels actes de vendetta familiale qui rappelle les évènements déplorés d’Owando, du mois de juillet 1976.

Le Comité Militaire du Parti dénonce et condamne, sans équivoque et très énergiquement, cet acte odieux d’autant plus que le Président de la République avait, sa vie durant, travaillé dans le sens de l’unité nationale et dans celui de bon rapports entre l’État et toutes les confessions religieuses exerçant en République populaire du Congo. Le Comité Militaire du Parti lance un vibrant appel au peuple pour que l’intérêt national reste au-dessus des passions.

L’assassinat du Cardinal Biayenda nous met dans un double deuil national. Les auteurs de ce crime crapuleux, qui sont déjà appréhendés par les forces de sécurité, seront châtiés de façon exemplaire au même titre que les assassins du Président Marien Ngouabi. Le Comité Militaire du Parti ne peut accepter de tels actes qui relèvent de la passion aveugle et du banditisme et met sévèrement en garde tous ceux qui s’aviseraient à troubler l’ordre public, au moment où le peuple congolais, tout entier, est plongé dans une profonde consternation.

Le Comité Militaire du Parti sait que notre peuple perd en la personne du Cardinal Émile Biayenda une éminente autorité ecclésiastique qui a œuvré toute sa vie pour les fils de notre pays. En ce moment douloureux que traverse notre peuple, le Comité Militaire du Parti demande de suivre l’exemple du grand patriote que fut le Cardinal Émile Biayenda ».

 

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